Laboratoire d'archéologie du Québec
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Bouteille à bière de gingembre. Côté AImage
Photo : Paul Litherland 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Bouteille à bière de gingembre. Côté BImage
Photo : Paul Litherland 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Bouteille à bière de gingembre. DessusImage
Photo : Paul Litherland 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Bouteille à bière de gingembre. DessousImage
Photo : Paul Litherland 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Bouteille à bière de gingembre. DétailImage
Photo : Paul Litherland 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

LOCALISATION

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

BjFj-4 > Opération 20 > Sous-opération D > Lot 6 > Numéro de catalogue 338

Contexte(s) archéologique(s)

Cave
Cellier
Dépotoir
Marché

Région administrative

Montréal

MRC

Montréal

Municipalité

Montréal

Fonction du site

domestique
commerciale
technologique
institutionnelle

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

La bouteille à bière de gingembre a été sélectionnée pour la collection archéologique de référence du Québec, car elle est associée aux caves situées sous les celliers du premier marché Sainte-Anne (1834-1844). L'objet offre également un bon exemple de céramique disponible au Québec au cours du deuxième quart du XIXe siècle. La bouteille présente aussi un intérêt en raison de sa marque de fabrication et de sa fonction.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

La bouteille à bière de gingembre en grès de type Derbyshire est produite à Denby dans le Derbyshire, en Angleterre, par la manufacture de Joseph Bourne, entre 1833 et les années 1840. Du XVIIe siècle jusqu'à aujourd'hui, les bouteilles en verre sont principalement utilisées pour l'embouteillage des boissons alcoolisées. C'est au cours du XIXe siècle que les bouteilles à bière individuelles en céramique comme celle-ci apparaissent sur le marché. Les bouteilles en grès sont privilégiées en raison de leur faible coût de production, de leur grande résistance et du haut degré de vitrification de la pâte, rendant l'objet imperméable. Ici, l'inscription « Warranted not to Absorb » en garantit l'étanchéité. Elles sont fermées par un bouchon de liège introduit dans le goulot, puis maintenu par un muselet afin de garder l'effervescence du breuvage.

Les bouteilles comme celle-ci sont traditionnellement associées aux bouteilles à bière de gingembre, plus connues sous le nom de « Ginger Beer ». Il s'agit d'une boisson alcoolisée très populaire en été en Grande-Bretagne et en Amérique du Nord depuis le XVIIIe siècle. Cette boisson est d'abord préparée à la maison et dans les tavernes avant d'être commercialisée à grande échelle. Des promotions visant la vente de bières de gingembre apparaissent dès 1820 au Québec. Cette boisson fort simple à réaliser est faite d'eau, de gingembre, de sucre sous forme de mélasse, de sucre de canne ou de miel, et de levure pour la fermentation. Il est possible que cette bouteille contienne d'autres types de bières à l'origine, spécialement des bières de table ou « petite bière ». Ce type de boisson se consomme à tout moment de la journée, même au déjeuner. Comparativement aux bières de type Ale ou Porter, les bières de table comme la bière d'épinette et la bière de gingembre ont un plus faible taux d'alcool. Historiquement, le pourcentage d'alcool des bières de gingembre est plus élevé au début du XIXe siècle qu'à la fin du même siècle. Étant donné sa faible concentration d'alcool, la bière de table est alors considérée comme une boisson de tempérance. D'après le contexte de sa découverte en milieu commercial et sa fonction, cet objet a possiblement été utilisé dans des lieux servant de la nourriture et des boissons.

La bouteille à bière de gingembre a été mise au jour en 2011 sur le site archéologique de la place D'Youville, à Montréal. À son inauguration en 1834, le marché Sainte-Anne offre en location plusieurs espaces. Le rez-de-chaussée loge des bouchers, des poissonniers et des vendeurs de volailles, alors que les portiques abritent des regrattiers ambulants. L'étage supérieur accueille des rassemblements ponctuels et des organisations diverses. L'étage inférieur est constitué de 28 celliers accessibles seulement de l'extérieur par des escaliers qui y descendent depuis la rue. Ce sont des espaces commerciaux loués à l'année ou au mois. En dix ans, ils hébergent des poissonniers et des vendeurs de denrées diverses, mais également de nombreux locataires éphémères de métiers et d'occupations variés, tels des cantiniers, des apothicaires et des artisans. Les archives judiciaires démontrent également que ces celliers abritent, à certaines occasions, des bordels et des débits de boisson illégaux.

La bouteille provient de la cave des celliers de la section nord du corps central du premier marché Sainte-Anne (1834-1844). Sous les décombres du Parlement incendié le 25 avril 1849, plusieurs monticules de déchets ont été localisés par les archéologues le long des murs entre les piliers ou contreforts soutenant les planchers des celliers du marché. Ces monticules ont révélé une importante quantité d'artéfacts complets après remontage qui aurait été jetée dans les caves par les trappes des planchers avant 1844 ou 1849. Étant donné leur position stratigraphique et l'absence d'altération par le feu, ces artéfacts sont associés à la période d'occupation des celliers par divers locataires du premier marché.

Élément(s) associé(s)

Groupes associés : Joseph Bourne and Son

RÉFÉRENCES

DUGUAY, Geneviève et Mario SAVARD. La fonction commerciale de Place-Royale entre 1820 et 1860. Patrimoine, série Dossiers, 68. Québec, Publications du Québec, 1990. 363 p.
Ethnoscop inc. Marché Sainte-Anne/Parlement du Canada-Uni, Montréal (BjFj-4). Fouilles archéologiques, 2011. Rapport de recherche archéologique [document inédit], Quartier international/Pointe-à-Callière/Ville de Montréal/MCCCF, 2012. 90 p.
GERMAIN, Robert. « Les p'tites bières ». Cap-aux-Diamants. No 28 (1992), p. 36-43.
GIGNAC, François et Hendrik VAN GIJSEGHEM. « Une occupation domestique au parlement de la province du Canada, à Montréal, 1844-1849 ». Archéologiques. No 35 (2022), p. 19-36.
Pointe-à-Callière, musée d'archéologie et d'histoire de Montréal. Montréal capitale : l’exceptionnelle histoire du site archéologique du marché Sainte-Anne et du parlement de la province du Canada. Montréal, Les Éditions de l'Homme, 2021. 236 p.