Laboratoire d'archéologie du Québec
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Pichet. Vue générale - Côté AImage
Photo : Daphnée Bouchard 2025, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Pichet. Côté BImage
Photo : Daphnée Bouchard 2025, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Pichet. Côté CImage
Photo : Daphnée Bouchard 2025, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Pichet. Côté DImage
Photo : Daphnée Bouchard 2025, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Pichet. DessusImage
Photo : Daphnée Bouchard 2025, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Pichet. DessousImage
Photo : Daphnée Bouchard 2025, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

LOCALISATION

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

BjFj-4 > Opération 32 > Sous-opération K > Lot 15 > Numéro de catalogue 1653

Contexte(s) archéologique(s)

Cave
Cellier
Dépotoir
Marché

Région administrative

Montréal

MRC

Montréal

Municipalité

Montréal

Fonction du site

domestique
commerciale
technologique
institutionnelle

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

Le pichet a été sélectionné pour la collection archéologique de référence du Québec, car il est associé aux caves situées sous les celliers du premier marché Sainte-Anne (1834-1844). L'objet constitue également un bon exemple de vaisselle de table disponible au Québec au cours du deuxième quart du XIXe siècle. Le pichet présente aussi un intérêt en raison de son décor, de sa forme et de son défaut de fabrication.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

Le pichet en terre cuite fine blanche est produit au Royaume-Uni entre 1820 et 1850. Il est tourné, tournassé et décoré à l'engobe. Le col ainsi que le bas du pichet sont ornés de bandes brunes, bleues et brun orangé. La paroi extérieure comporte un décor à motif « Mocha » à la verticale brun foncé sur un fond uni brun pâle. Le bec verseur ainsi que l'anse préalablement moulée sont collés sur l'objet. Le pichet est cuit, ensuite trempé dans la glaçure et enfin cuit une dernière fois. Le décor du pichet présente plusieurs lacunes résultant d'erreurs de fabrication.

L'engobe est une mixture liquide composée d'argiles colorées appliquées avant la première cuisson. Sur les terres cuites fines, les décors à l'engobe sont généralement rencontrés sur les objets circulaires creux utilitaires comme les pichets, les bols, les chopes et les pots de chambre. Le présent motif est connu sous l'appellation « Mocha », qui apparait sur les terres cuites fines vers 1790. Ce décor est reconnaissable par son motif arborescent ou dendritique sur un fond uniforme. Il est réalisé en trempant un pinceau dans une solution acide colorée nommée « thé moka » (« Mocha Tea ») qui est appliquée en touchant la pointe du pinceau sur l'objet préalablement engobé et encore humide. En touchant l'engobe, une réaction chimique et physique survient et crée la diffusion du motif selon l'orientation de l'écoulement de la solution acide. Ici, le motif est appliqué sur l'objet placé à l'envers. Selon les anciens livres de recettes, il semble que chaque manufacture ait sa propre recette de « thé moka ». La concoction peut contenir entre autres de l'encre d'imprimerie, du jus de tabac, du houblon et même de l'urine. Tout comme les terres cuites fines aux décors « Shell Edge » et à l'éponge, les céramiques aux décors à l'engobe sont peu coûteuses.

Le pichet est un récipient de service utilisé à la table pour transvaser et servir des liquides comme les boissons. Au XIXe siècle, les pichets se déclinent en plusieurs grandeurs pouvant contenir entre une demi-pinte et deux pintes de liquides. Trouvé sur le site du marché Sainte-Anne et considérant son faible coût, ce pichet a pu servir comme vaisselle dans une cantine, un bar ou un restaurant établis au marché.

Le pichet a été mis au jour en 2017 sur le site archéologique de la Place D'Youville, à Montréal. À son inauguration en 1834, le marché Sainte-Anne offre en location plusieurs espaces. Le rez-de-chaussée loge des bouchers, des poissonniers et des vendeurs de volailles alors que les portiques abritent des regrattiers ambulants. L'étage supérieur accueille des rassemblements ponctuels et des organisations diverses. L'étage inférieur est constitué de 28 celliers accessibles seulement de l'extérieur par des escaliers qui y descendent depuis la rue. Ce sont des espaces commerciaux loués à l'année ou au mois. En dix ans, ils hébergent des poissonniers et des vendeurs de denrées diverses, mais également de nombreux locataires éphémères de métiers et d'occupations variés, tels des cantiniers, des apothicaires et des artisans. Les archives judiciaires démontrent également que ces celliers abritent, à certaines occasions, des bordels et des débits de boisson illégaux.

Le pichet provient de la cave des celliers de la section sud de l'aile est du premier Marché-Sainte-Anne (1834-1844). Sous les décombres du parlement incendié le 25 avril 1849, plusieurs monticules de déchets ont été localisés par les archéologues le long des murs entre les piliers ou contreforts soutenant les planchers des celliers du marché. Ces monticules ont révélé une importante quantité d'artéfacts complets qui auraient été jetés dans les caves par les trappes des planchers des celliers avant 1844 ou 1849. Étant donné leur position stratigraphique et l'absence d'altération par le feu, ces artéfacts sont associés à la période d'occupation des celliers par divers locataires du premier marché.

RÉFÉRENCES

CARPENTIER, Donald et Jonathan RICKARD. « Slip Decoration in the Age of Industrialization ». Ceramics in America (2001), s.p.
Ethnoscop inc. Fouilles, sondages et surveillance archéologique sur la Place d'Youville Ouest, site du Marché-Sainte-Anne-et-du-Parlement-du-Canada-Uni (BjFj-4). Rapport de recherche archéologique [document inédit], Pointe-à-Callière/MCCQ/Ville de Montréal, 2018. 78 p.
GIGNAC, François et Hendrik VAN GIJSEGHEM. « Une occupation domestique au parlement de la province du Canada, à Montréal, 1844-1849 ». Archéologiques. No 35 (2022), p. 19-36.
HENRYWOOD, R. K. An illustrated guide to British jugs : from medieval times to the twentieth century. Shrewsbury, Swan Hill Press, 1997. 256 p.
LABONTÉ-LECLERC, Mélissa et Delphine LÉOUFFRE. « Whiteware ». MÉTREAU, Laetitia, dir. Identifier la céramique au Québec. Cahiers d'archéologie du CÉLAT, 41. Québec, CÉLAT, 2016, p. 237-244.
MILLER, George L. « A Revised Set of CC Index Values for Classification and Economic Scaling of English Ceramics from 1787 to 1880 ». Historical Archaeology. Vol. 25, no 1 (1991), p. 1-25.
Pointe-à-Callière, musée d'archéologie et d'histoire de Montréal. Montréal capitale : l’exceptionnelle histoire du site archéologique du marché Sainte-Anne et du parlement de la province du Canada. Montréal, Les Éditions de l'Homme, 2021. 236 p.
SUSSMAN, Lynne. Mocha, Banded, Cat's Eye and Other Factory-Made Slipware. Boston, CNEHA, 1997. 102 p.