Laboratoire d'archéologie du Québec
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Fragments de cruche. Faces extérieuresImage
Photo : Mathieu Landry 2022, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Fragments de cruche. Faces intérieuresImage
Photo : Mathieu Landry 2022, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Fragments de cruche. Côté AImage
Photo : Mathieu Landry 2022, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Fragments de cruche. Côté BImage
Photo : Mathieu Landry 2022, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

CeEt-960 > Opération 5 > Sous-opération A > Lot 4 > Numéro de catalogue 4

Contexte(s) archéologique(s)

Démolition
Habitation, maison

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

Les fragments de cruche ont été sélectionnés pour la collection archéologique de référence du Québec, car ils représentent un exemple de rejet de production de contenant en terre cuite grossière locale. Ils ont également été choisis parce qu'ils sont associés à la Poterie Bell (1845-1932) de Québec.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

La cruche en terre cuite grossière à glaçure incolore est tournée au tour de potier entre 1845 et 1932 à la Poterie Bell de Québec. L'argile pour sa fabrication est extraite de la terre familiale, puis elle subit l'étape de correction. Elle est homogénéisée et mise en portion selon le poids désiré. Une balle d'argile est formée, puis jetée au centre de la girelle du tour, qui est mise en mouvement. À l'aide de la force centrifuge et de la pression des mains, le potier procède à l'ébauchage de la cruche avec des gestes précis et contrôlés. La pièce est détachée de la girelle à l'aide d'un fil séparateur, puis mise à sécher. Entretemps, un morceau d'argile est modelé pour former une anse verticale, qui est mise à sécher jusqu'à l'atteinte de l'état cuir. Le potier gratte ensuite l'emplacement de l'anse sur la jarre ainsi que le dos de l'anse, puis applique une couche de barbotine ou d'eau aux endroits grattés et appuie l'anse sur la cruche. Le contenant est mis à sécher, puis est cuit. La glaçure est appliquée sur la cruche, qui est cuite à nouveau. La cruche, jugée insatisfaisante, est rejetée. En effet, des défauts de fabrication sont visibles sur la glaçure appliquée à l'intérieur du récipient, le rendant inutilisable pour entreposer et servir des liquides.

Pour sa production, la Poterie Bell utilise de l'argile locale, mais importe également les matériaux nécessaires pour la fabrication de pipes blanches ainsi que le charbon pour la cuisson. La manufacture utilise des machines à vapeur, mais elle a encore recours au façonnage au tour de potier pour la production de cruches et de certains pots à plantes, par exemple. Dès 1862, la fabrique commence la fabrication de pipes en argile blanche similaires aux productions de Montréal et de Grande-Bretagne de l'époque.

Les fragments de cruche ont été mis au jour en 2021 sur le site de la Ferme Cadet, sur la rive sud de la rivière Saint-Charles, à Québec. Concédée en 1673, la terre est située le long de l'ancien chemin de Lorette. De nombreux propriétaires se sont succédé depuis sa concession. L'un d'eux est Joseph-Michel Cadet, connu pour son implication dans l'Affaire du Canada, propriétaire de la terre de 1752 à 1766 sans y avoir habité. Elle est plutôt exploitée par des engagés. La terre est transférée officiellement à William Moodie Bell vers 1830 et reste dans la famille durant plus d'un siècle. À sa mort en 1837, la propriété est léguée à ses fils William et David Bell. En 1845, ceux-ci érigent une manufacture de poterie sur la terre, plus à l'est de la maison familiale. Cette poterie se spécialise d'abord dans la production de briques et de tuyaux en argile locale, puis elle produit d'autres objets tels que des pots à plantes, des contenants utilitaires et des pipes à pâte blanche. La poterie reste en activité jusqu'en 1932.

Les fragments de cruche ont été retrouvés dans une couche archéologique datée d'entre 1947 et 1948 associée à la démolition de l'ancienne habitation de la famille Bell. Une tuile à essai avec une pâte et une glaçure similaires à la cruche a été trouvée dans la même couche archéologique. Plusieurs rejets de production associés à la Poterie Bell y ont été découverts, y compris plusieurs objets en terre cuite commune et des pipes comportant des défauts de fabrication ainsi que la marque « W. & D. Bell ».

RÉFÉRENCES

COLLARD, Elizabeth. Nineteenth-Century Pottery and Porcelain in Canada. Kingston / Montréal, McGill-Queen's University Press, 1984. 477 p.
COPELAND, Robert. Manufacturing Processes of Tableware during the Eighteenth and Nineteenth Centuries. Royaume-Uni, The Northern Ceramic Society, 2009. 186 p.
Ethnoscop inc. Patrimoine archéologique des poteries, briqueteries, tuileries et fabriques de pipes au Québec. Étude produite dans le cadre de la participation du Québec au Répertoire canadien des lieux patrimoniaux, volet archéologique. Québec, Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, 2009. 52 p.