Laboratoire d'archéologie du Québec
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PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

16G > Opération 8 > Sous-opération A > Lot 32 > Numéro de catalogue 38Q
BiFh-10 > Opération 8 > Sous-opération A > Lot 32 > Numéro de catalogue 38Q

Contexte(s) archéologique(s)

Fort
Latrines

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

Le fragment de bol à thé a été sélectionné pour la collection archéologique de référence du Québec, car il témoigne d'un certain raffinement dans l'alimentation des officiers des postes frontaliers. De plus, puisqu'il s'agit d'un bien produit en Angleterre, cet objet pourrait être issu du commerce illicite qui se tenait dans les postes frontaliers de la vallée de la rivière Richelieu sous le Régime français (1608-1759).

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

Le fragment de bol en faïence blanche est fabriqué en Angleterre, possiblement lors de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Le bol est décoré sur sa paroi intérieure de motifs linéaires en camaïeu bleu.

Les bols sont généralement utilisés à l'époque afin de boire des boissons chaudes telles que le thé. Leur forme polyvalente permet cependant de les utiliser pour la consommation de plusieurs autres aliments. Produit en Angleterre, ce bol à thé aurait été importé dans les colonies américaines. Il a possiblement été échangé par la suite au sein du réseau de commerce illicite ayant lieu à la frontière de la rivière Richelieu et se serait trouvé entre les mains des officiers français du fort Chambly. Il faut souligner que ce poste militaire a longtemps été occupé par des troupes chargées de surveiller ce trafic illégal. Il aurait pu aussi être utilisé par des officiers britanniques nouvellement en possession du fort Chambly, le contexte mélangé de sa découverte permettant de l'associer aussi au début du Régime britannique (1760-1867).

Le fragment de bol à thé est mis au jour entre 1976 et 1978 sur le site du Fort-Chambly, situé sur la rive ouest de la rivière Richelieu au pied des rapides de Chambly, dans la municipalité du même nom. Au tout début de la colonie de Ville-Marie, les guerres franco-iroquoises (1643-1667 et 1684-1701) font rage et plusieurs établissements français sont attaqués. Afin de sécuriser la région montréalaise, les autorités françaises envoient dans la colonie le régiment de Carignan-Salières en 1665. Dès lors, ces militaires entreprennent la construction de cinq postes le long de la rivière Richelieu, correspondant aux forts de Sorel, Saint-Jean, Saint-Louis (Chambly), Sainte-Thérèse et Sainte-Anne. La rivière constitue alors une voie d'accès naturelle et efficace en provenance des colonies anglaises et de la région d'Albany. À l'issue de la signature de paix conclue à Trois-Rivières en 1667, la limite méridionale de la frontière est réduite à Chambly et les postes les plus au sud sont abandonnés. À la reprise des hostilités, d'importants travaux sont entrepris à Chambly et un nouveau fort y est construit. Après quelques réparations réalisées en 1693, le fort est incendié en 1702. Il est immédiatement rebâti en bois, mais devant les rumeurs persistantes d'une attaque anglaise, le fort est entièrement reconstruit en pierre. L'importance stratégique de ce poste ne s'est pas démentie tout au long du Régime français, et le fort Chambly a chaque fois joué un rôle clé lors des divers conflits. En temps de paix, une garnison demeure tout de même au fort afin d'y assurer un contrôle du commerce illicite sur la rivière Richelieu.

L'objet a été découvert dans les latrines du fort Chambly. La fouille de ces latrines a livré plusieurs objets de fabrication française et britannique à l'intérieur de contextes mélangés, mêlant des objets du Régime britannique (1760-1867) à des objets plus anciens. Puisque les bols de faïence blanche étaient à l'époque considérés comme étant des objets plus luxueux que ceux en terre cuite commune, ce fragment pourrait témoigner d'une alimentation plus raffinée des officiers, et ce, malgré le fait qu'ils aient été stationnés dans un poste militaire frontalier.

RÉFÉRENCES

FRANÇOIS, Miville-Deschênes. Quand ils ne faisaient pas la guerre ou l’aspect domestique de la vie militaire au fort Chambly pendant le régime français d’après les objets archéologiques. Ottawa, Lieux et parcs historiques nationaux, Environnement Canada-Parcs, 1987. 113 p.
GENÊT, Nicole. La faïence de Place-Royale. Collection Patrimoines, série Dossiers, 45. Sainte-Foy, Québec, Publications du Québec, 1996. 315 p.