Laboratoire d'archéologie du Québec
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PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

16G > Opération 8 > Sous-opération A > Lot 32 > Numéro de catalogue 30Q
BiFh-10 > Opération 8 > Sous-opération A > Lot 32 > Numéro de catalogue 30Q

Contexte(s) archéologique(s)

Fort
Latrines

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

L'assiette a été sélectionnée pour la collection archéologique de référence du Québec, car elle témoigne d'un certain raffinement dans l'alimentation des officiers des postes militaires frontaliers. De plus, puisqu'il s'agit d'un bien produit en Angleterre, cet objet pourrait être issu du commerce illicite qui se tenait dans les postes frontaliers de la vallée de la rivière Richelieu sous le Régime français (1534-1760).

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

L'assiette en grès fin blanc est recouverte d'une glaçure saline et présente un rebord contourné. Il s'agit d'une production britannique fort populaire entre 1740 et 1760. Entièrement blanc, ce récipient servant à la consommation et au service des aliments porte un décor moulé sur son rebord, qui est composé d'un bourrelet extérieur godronné et souligné de deux sillons intérieurs.

Produite en Angleterre, l'assiette serait importée dans les colonies américaines. Elle serait ensuite échangée au sein du réseau de commerce illicite ayant lieu à la frontière de la rivière Richelieu, et se serait trouvée entre les mains des officiers français du fort Chambly. Il faut souligner que ce poste militaire a longtemps été occupé par des troupes chargées de surveiller ce trafic illégal. Elle pourrait aussi être utilisée par des officiers britanniques nouvellement en possession du fort Chambly, le contexte mélangé de sa découverte permettant aussi de l'associer au début du Régime britannique (1760-1867).

L'assiette est mise au jour entre 1976 et 1978 sur le site du Fort-Chambly, situé sur la rive ouest de la rivière Richelieu au pied des rapides de Chambly, dans la municipalité du même nom. Au tout début de la colonie de Ville-Marie, les guerres franco-iroquoises (1643-1667 et 1684-1701) font rage et plusieurs établissements français sont attaqués. Afin de sécuriser la région montréalaise, les autorités françaises envoient dans la colonie le régiment de Carignan-Salières en 1665. Dès lors, ces militaires entreprennent la construction de cinq postes le long de la rivière Richelieu, correspondant aux forts de Sorel, Saint-Jean, Saint-Louis (Chambly), Sainte-Thérèse et Sainte-Anne. La rivière constitue alors une voie d'accès naturelle et efficace en provenance des colonies anglaises et de la région d'Albany. À l'issue de la signature de paix conclue à Trois-Rivières en 1667, la limite méridionale de la frontière est réduite à Chambly et les postes les plus au sud sont abandonnés. À la reprise des hostilités, d'importants travaux sont entrepris à Chambly et un nouveau fort y est construit. Après quelques réparations réalisées en 1693, le fort est incendié en 1702. Il est immédiatement rebâti en bois, mais devant les rumeurs persistantes d'une attaque anglaise, le fort est entièrement reconstruit en pierre. L'importance stratégique de ce poste ne se démentit pas tout au long du Régime français et le fort Chambly a chaque fois joué un rôle clé lors des divers conflits. En temps de paix, une garnison demeure tout de même au fort afin d'y assurer un contrôle du commerce illicite sur la rivière Richelieu.

L'objet a été découvert dans les latrines du fort. La fouille de ces latrines a livré plusieurs objets de fabrication française et britannique à l'intérieur de contextes mélangés, mêlant des objets du Régime britannique (1760-1867) à des objets plus anciens. Il s'agit d'une assiette qui témoigne d'un certain raffinement à la table des officiers dans les postes militaires frontaliers, qu'ils aient été français ou anglais.

RÉFÉRENCES

BRASSARD, Michel et Myriam LECLERC. Identifier la céramique et le verre anciens au Québec : guide à l'usage des amateurs et des professionnels. Cahiers d'archéologie du CÉLAT, 12. Sainte-Foy, CÉLAT, 2001. 207 p.
FRANÇOIS, Miville-Deschênes. Quand ils ne faisaient pas la guerre ou l’aspect domestique de la vie militaire au fort Chambly pendant le régime français d’après les objets archéologiques. Ottawa, Lieux et parcs historiques nationaux, Environnement Canada-Parcs, 1987. 113 p.
LAPOINTE, Camille et Guy PLOURDE. Les objets domestiques en grès fin anglais de Place-Royale. Collection Patrimoines, série Dossiers, 97. Sainte-Foy, Québec, Publications du Québec, 1996. 244 p.
MÉTREAU, Laetitia, dir. Identifier la céramique au Québec. Cahiers d'archéologie du CÉLAT, 41. Québec, CÉLAT, 2016. s.p.