Laboratoire d'archéologie du Québec
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Fragment de pointe. Face AImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Fragment de pointe. Face BImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Fragment de pointe. ProfilImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

BiEr-14 > Numéro de catalogue 1654L

Contexte(s) archéologique(s)

Campement

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

Le fragment de pointe a été sélectionné pour la collection archéologique de référence du Québec, car elle est un exemple représentatif de cannelures envahissantes à la terminaison nette. L'aménagement de cannelures à partir de la base constitue une technique caractéristique du type « Michaud-Neponset ». Finalement, cet objet a été choisi pour sa rareté, puisqu'au Québec, ce type de pointe n'a été découvert jusqu'à présent que dans la région du Lac-Mégantic.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

Le fragment de pointe est représentatif de la période du Paléoindien ancien, qui se situe de 12 000 à 10 000 ans avant aujourd'hui. Ce fragment est plus spécifiquement lié à la phase médiane de cette période, soit au style « Michaud-Neponset » associé à la Nouvelle-Angleterre ou au style « Barnes » propre à la région des Grands Lacs. L'objet, correspondant à la partie distale de la pointe, est taillé dans une rhyolite beige altérée et de bonne qualité, une pierre provenant de l'État du New Hampshire, possiblement du mont Jasper ou d'un affleurement près de Jefferson. L'identification du matériau est possible grâce à la présence d'intrusions typiques des rhyolites, ainsi que la couleur beige de la pierre, généralement obtenue lors du processus d'altération de cette matière. Puisque les éclats de débitage de ce matériau sont rares sur le site de la découverte de l'objet, l'outil aurait vraisemblablement été importé à un stade de finition avancé sur le site.


La pointe de type « Michaud-Neponset » est une pointe de projectile servant à armer une lance, utilisée principalement pour la chasse au gros gibier comme le caribou. La pointe peut également servir de couteau. Le fragment de pointe serait caractéristique de ce type, présentant une cannelure dépassant largement la moitié de la longueur de la lame. Cet élément permet d'estimer son âge entre 12 400 et 11 900 ans avant aujourd'hui. Toutefois, cette attribution demeure hypothétique, les éléments permettant son identification formelle étant absents ou incomplets. L'amincissement de la base ainsi que l'aménagement de cannelures sert à faciliter son emmanchement sur une lance, qui est ensuite projetée à la façon d'un javelot ou encore à l'aide d'un propulseur.

La caractéristique principale de cette pointe est la présence d'une seule cannelure à terminaison nette, qui aurait provoqué la cassure. Cette erreur technique est directement attribuable à la volonté des tailleurs de pointes du type «Michaud-Neponset» de produire des cannelures qui dépassent la moitié de la longueur totale de la pointe. Cette pointe a probablement été brisée avant l'aménagement de la deuxième cannelure sur l'autre face. La cannelure à terminaison nette atteint presque le sommet de la pointe, provoquant la cassure de l'objet, puis son abandon sur le site.

Le fragment de pointe est mis au jour en 2008 sur le site Cliche-Rancourt (BiEr- 14), situé sur une rive du lac aux Araignées dans le secteur de Mégantic en Estrie. Il provient de l'aire d'occupation numéro 3 du site, correspondant à un atelier de taille de pierre, du chert Munsungun rouge. Le fragment de pointe en rhyolite détonne dans ce contexte. De plus, elle est la seule pointe comprenant une cannelure trouvée dans cette aire d'occupation. Cette découverte témoigne de la présence d'un groupe associé à la culture paléoindienne ancienne sur le territoire du Québec il y a de cela plus de 11 000 ans.

La très grande majorité des artéfacts mis au jour avec ce fragment de pointe ont été fabriqués à partir de pierres provenant des États de la Nouvelle-Angleterre. Il est donc fort probable que le groupe de la région de Mégantic faisait partie d'une bande plus étendue qui avait pour centre d'opération le Maine et le New Hampshire. Au Québec, ce type de pointe est rare. Jusqu'à présent, les seuls spécimens trouvés ont été mis au jour dans la région de Mégantic.

L'objet fait partie de l'exposition itinérante « Clovis, peuple chasseur de caribous » présentée par le Musée de la nature et des sciences de Sherbrooke entre 2015 et 2020.

RÉFÉRENCES

CHAPDELAINE, Claude. Abonesig, site de taille de galets de quartz, et le Paléoindien ancien sur Cliche-Rancourt : une huitième saison de fouilles au Méganticois. Juillet et Août 2008. Rapport de recherche archéologique [document inédit], Université de Montréal, 2008. 141 p.
CHAPDELAINE, Claude. « Cliche-Rancourt, un site du Paléoindien ancien ». CHAPDELAINE, Claude, dir. Entre lacs et montagnes au Méganticois, 12 000 ans d’histoire amérindienne. Paléo-Québec, 32. Montréal, Recherches amérindiennes au Québec, 2007, p. 47-120.
CHAPDELAINE, Claude. « Early Paleoindian Occupation at Cliche-Rancourt, Southeastern Quebec ». CHAPDELAINE, Claude, dir. Late Pleistocene Archaeology and Ecology in the Far Northeast. College Station, Texas A&M University Press, 2012, p. 135-163.
CHAPDELAINE, Claude. « Le site Cliche-Rancourt et le peuplement du sud-est du Québec au Paléoindien ancien ». VIALOU, Denis, dir. Peuplements et préhistoire en Amériques. Documents Préhistoriques, 28. Paris, Éditions du Comité des travaux historiques et scientifiques, 2011, p. 121-138.