Laboratoire d'archéologie du Québec
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Ébauche de pointe foliacée. Face AImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Ébauche de pointe foliacée. Face BImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Ébauche de pointe foliacée. ProfilImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

BiEr-14 > Numéro de catalogue 497L

Contexte(s) archéologique(s)

Campement

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

L'ébauche de pointe foliacée a été sélectionnée pour la collection archéologique de référence du Québec, car elle est un témoin représentatif de la technique utilisée afin de tailler des cannelures à partir de l'aménagement d'une protubérance, ou mamelon, au centre de la base inachevée. Finalement, cet objet a été choisi pour sa rareté, puisqu'au Québec, ce type de pointe n'a été découvert jusqu'à présent que dans la région du Lac-Mégantic.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

L'ébauche de pointe foliacée est représentative de la période du Paléoindien ancien, qui se situe de 12 000 à 10 000 ans avant aujourd'hui. Cette pointe est plus spécifiquement liée à la phase médiane de cette période, soit au style « Michaud-Neponset » associé à la Nouvelle-Angleterre ou au style « Barnes » propre à la région des Grands Lacs. L'objet est taillé dans une rhyolite verdâtre de bonne qualité, une pierre provenant de l'État du New Hampshire, possiblement du mont Jasper ou d'un affleurement près de Jefferson. Puisque les éclats de débitage de ce matériau sont rares sur le site de découverte de l'objet, l'outil aurait vraisemblablement été importé à un stade de finition avancé sur le site.

La pointe foliacée est une pointe de projectile servant à armer une lance, utilisée principalement pour la chasse au gros gibier comme le caribou. La pointe peut également servir de couteau. Cette pointe est une ébauche, puisque la base n'est pas achevée et que la pointe ne comporte qu'une seule cannelure. De plus, la présence du mamelon au centre de la base correspond à une technique de taille servant à détacher les éclats de cannelure, indiquant que la pointe n'a jamais été terminée. Le tailleur aligne son coup sur cette protubérance pour dégager un éclat de cannelure sur chacune des faces. Une fois les deux détachements réussis, la base est taillée pour faire disparaitre la protubérance et donner une allure légèrement concave à la base. La présence de la cannelure et du mamelon près de la base permet également d'associer cette pointe au type « Michaud-Neponset » et d'estimer son âge entre 12 400 et 11 900 ans avant aujourd'hui. L'amincissement de la base ainsi que l'aménagement de cannelures sert à faciliter son emmanchement sur une lance, qui est ensuite projetée à la façon d'un javelot ou encore à l'aide d'un propulseur. Toutefois, cette attribution demeure hypothétique, les éléments permettant son identification formelle étant absents ou incomplets. La taille de la première cannelure ayant vraisemblablement causé la cassure de la pointe, la pièce est abandonnée en cours de fabrication sur le site.

L'ébauche de pointe foliacée est mise au jour en 2004 sur le site Cliche-Rancourt (BiEr-14), situé sur une rive du lac aux Araignées dans le secteur de Mégantic en Estrie. Elle provient de l'aire d'occupation principale du site, comprenant les restes d'un campement recelant des traces d'activités domestiques et artisanales, comme la taille de la pierre. Cette découverte témoigne de la présence d'un groupe associé à la culture paléoindienne ancienne sur le territoire du Québec il y a de cela plus de 11 000 ans.

La très grande majorité des artéfacts mis au jour avec cette ébauche ont été fabriqués à partir de pierres provenant des États de la Nouvelle-Angleterre. Il est donc fort probable que le groupe de la région de Mégantic faisait partie d'une bande plus étendue qui avait pour centre d'opération le Maine et le New Hampshire. Au Québec, ce type de pointe est rare. Jusqu'à présent, les seuls spécimens trouvés ont été mis au jour dans la région de Mégantic.

L'identification de la matière première composant la pointe est confirmée par une analyse microscopique effectuée à l'aide de la fluorescence X. L'objet fait partie de l'exposition itinérante « Clovis, peuple chasseur de caribous » présentée par le Musée de la nature et des sciences de Sherbrooke entre 2015 et 2020.

RÉFÉRENCES

BURKE, Adrian L., Claude CHAPDELAINE et Gilles GAUTHIER. « Refining the Paleoindian Lithic Source Network at Cliche-Rancourt Using XRF ». Archaeology of Eastern North America. Vol. 42 (2014), p. 101-128.
CHAPDELAINE, Claude. « Cliche-Rancourt, un site du Paléoindien ancien ». CHAPDELAINE, Claude, dir. Entre lacs et montagnes au Méganticois, 12 000 ans d’histoire amérindienne. Paléo-Québec, 32. Montréal, Recherches amérindiennes au Québec, 2007, p. 47-120.
CHAPDELAINE, Claude. « Early Paleoindian Occupation at Cliche-Rancourt, Southeastern Quebec ». CHAPDELAINE, Claude, dir. Late Pleistocene Archaeology and Ecology in the Far Northeast. College Station, Texas A&M University Press, 2012, p. 135-163.
CHAPDELAINE, Claude. Le Méganticois : Fouilles et inventaire dans le secteur du Lac-Aux-Araignées, juin et septembre 2004. Rapport de recherche archéologique [document inédit], Université de Montréal, 2004. 94 p.