Laboratoire d'archéologie du Québec
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Fragments de canot d'écorce. Vue généraleImage
Photo : Julie Toupin 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Fragments de canot d'écorce. Détail de l'assemblageImage
Photo : Julie Toupin 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

40G > Opération 100 > Sous-opération H > Lot 61
BhFh-2 > Opération 100 > Sous-opération H > Lot 61

Contexte(s) archéologique(s)

Fort
Militaire

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

Les fragments de canot d'écorce ont été sélectionnés pour la collection archéologique de référence du Québec, car ils représentent l'un des moyens de transport les plus fréquemment utilisés pour se déplacer vers les postes éloignés et les sites frontaliers en Nouvelle-France. Ils ont aussi été choisis parce qu'il s'agirait des seuls fragments de canot d'écorce conservés à ce jour dans les collections archéologiques québécoises.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

Les fragments de canot d'écorce font partie d'une embarcation qui est fabriquée en Amérique du Nord, possiblement en Nouvelle-France, lors de la seconde moitié du XVIIIe siècle. L'objet se compose de deux gros morceaux d'écorce de bouleau et de six petits fragments. L'un des gros morceaux est percé d'une série de perforations disposées en quinconce, possiblement pour y passer un fil en cuir afin de fixer deux panneaux ensemble.

Les canots d'écorce sont des embarcations fluviales légères servant au transport d'un nombre restreint de passagers et de bagages. Sa conception et son petit format en augmentent la manoeuvrabilité, le rendant adapté à la navigation sur les rivières au cours ponctué de rapides. Les canots peuvent aussi être portés à pied afin de contourner les rapides ou les chutes. L'écorce est façonnée en la plaçant sur une charpente et en utilisant de la vapeur pour l'assouplir. Une fois séchée, la feuille de bouleau conserve la forme désirée et les pièces d'écorce sont alors cousues ensemble au moyen de fils en cuir ou en babiche. Outre les canots, les populations autochtones fabriquent plusieurs autres objets avec l'écorce de bouleau, dont des paniers et des contenants de cuisson. Toutefois, ce type d'objet est progressivement abandonné après les premiers contacts avec les Européens au profit d'autres contenants plus résistants. L'utilisation du bouleau a toutefois perduré pour la construction d'embarcations.

Ce type de moyen de transport est fragile et nécessite beaucoup d'entretien et de réparation. Il est tout à fait possible que ces fragments correspondent à un élément découpé sur un canot pour être remplacé. Cette hypothèse expliquerait les contours plutôt nets visibles sur l'objet. La partie à remplacer serait donc jetée dans un fossé tout juste avant ou un peu après la Conquête (1759).

Les fragments de canot d'écorce sont mis au jour en 2012 sur le site du Fort Saint-Jean, dans la municipalité de Saint-Jean-sur-Richelieu. Il s'agit de l'un des plus anciens complexes militaires permanents en Amérique du Nord, ayant connu la plus longue occupation militaire continue après la ville de Québec. Au tout début de la colonie de Ville-Marie, les guerres franco-iroquoises (1643-1667 et 1684-1701) font rage et plusieurs établissements français sont attaqués. Afin de sécuriser la région montréalaise, les autorités françaises envoient dans la colonie le régiment de Carignan-Salières en 1665. Dès lors, ces militaires entreprennent la construction de cinq postes le long de la rivière Richelieu, correspondant aux forts de Sorel, Saint-Jean, Saint-Louis (Chambly), Sainte-Thérèse et Sainte-Anne. La rivière constitue alors une voie d'accès naturelle et efficace en provenance des colonies anglaises et de la région d'Albany. En 1672, après une période de paix, le poste de Saint-Jean cesse d'être utilisé. Il reprend du service au moment de la construction du fort Saint-Frédéric entre 1727 et 1734 sur la rive ouest du lac Champlain, qui devait assurer la protection des barques chargées d'approvisionner le nouveau poste en matériaux de construction et autres. En 1748, après la signature du traité d'Aix-la-Chapelle, un second fort Saint-Jean est construit. Une nouvelle enceinte palissadée de forme carrée dotée de bastions aux angles est ajoutée. Occupé depuis de manière continue, le fort est amélioré à quelques reprises, étant ainsi doté en 1756 d'un chantier naval. En 1760, pendant la Conquête, le fort est incendié par les Français, qui se replient vers Montréal. Une garnison britannique s'y installe ensuite, le reconstruisant en 1775 et y érigeant des retranchements.

Le milieu gorgé d'eau duquel proviennent ces fragments en a favorisé la préservation mais a rendu difficile l'identification des contextes archéologiques. Les fragments pourraient donc provenir d'une couche de démolition de 1760 ou d'un fossé de comblement de la fin du XVIIIe¿siècle. Une pièce similaire provient du site de la Maison-des-Marins (BjFj-163).

RÉFÉRENCES

BEAUPRÉ, Andrew. Fort Saint-Jean Archaeological Project 2012 Field Season. Final Report. Rapport de recherche archéologique [document inédit], Université Laval/Musée du fort Saint-Jean, 2015. 138 p.
Ethnoscop inc. Projet d'agrandissement de Pointe-à-Callière, musée d'archéologie et d'histoire de Montréal. Maison-des-Marins, 165, place D'Youville. (BjFj-163-Maison-des-Marins et BjFj-47-Corridor Ouest). Étude de potentiel et interventions archéologiques. Rapport de recherche archéologique [document inédit], Ville de Montréal/MCC/Pointe-à-Callière, 2017. 299 p.
Musée canadien de l'histoire. La construction du canot d'écorce [En Ligne]. https://www.museedelhistoire.ca/cmc/exhibitions/aborig/watercraft/wab02fra.html
POLING, Jim, Sr. The Canoe: An Illustrated History. Woodstock, Countryman Press, 2001. 143 p.