Laboratoire d'archéologie du Québec
< RETOUR À LA RECHERCHE
Phalange de baleine. Côté AImage
Photo : Joey Leblanc 2018, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Phalange de baleine. Côté BImage
Photo : Joey Leblanc 2018, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Phalange de baleine. Détail d'une coupureImage
Photo : Joey Leblanc 2018, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

LOCALISATION

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

EdBt-3 > Numéro de catalogue 6543b

Région administrative

Côte-Nord

MRC

Le Golfe-du-Saint-Laurent

Municipalité

Côte-Nord-du-Golfe-du-Saint-Laurent

Fonction du site

domestique
pêche

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

La phalange de baleine fait partie de la collection archéologique de référence du Québec parce qu'elle témoigne de la chasse à la baleine à Petit Mécatina et qu'elle a été trouvée dans un dépôt stratifié.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

La phalange de baleine est un os appartenant à une nageoire pectorale de cétacé. Il pourrait s'agir d'une baleine boréale (Balaena mysticetus). Cet os témoigne de la chasse à la baleine qui a été pratiquée à Petit Mécatina par les Basques au XVIe siècle et au début du XVIIe siècle.

La baleine franche de l'Atlantique Nord (Eubalaena glacialis) a longtemps été considérée comme étant l'espèce la plus chassée par les Basques au Canada au XVIe siècle, suivie de près par la baleine boréale. Cette chasse serait une des causes de la diminution radicale de ces espèces. Des analyses d'ADN effectuées sur des ossements de baleines provenant de différents lieux de chasse démontrent que les Basques recherchaient surtout la baleine boréale. Cette baleine ne fréquente plus le golfe du Saint-Laurent, vraisemblablement à cause du réchauffement des eaux dans la région. Aux XVIe et XVIIe siècles, l'effet du Petit Âge glaciaire semble avoir refroidi les eaux de la région, permettant à cette espèce d'y résider une partie de l'année. À Petit Mécatina, presque tous les os analysés appartiennent à des baleines boréales, sauf un échantillon sur les 37 identifiés qui appartient à une baleine à bosse (Megaptera novaeangliae). Toutes ces baleines sont chassées pour leur graisse, qui peut être transformée en huile, et pour leurs fanons, utilisés dans la fabrication d'un grand nombre d'objets.

Les fouilles subaquatiques dans l'anse du Petit Mécatina permettent de trouver plusieurs os de baleine autour des monticules de pierres de lest provenant des baleiniers basques qui y étaient ancrés. Il s'agit généralement de phalanges et de métacarpes provenant des nageoires des baleines, ou de petites vertèbres. Les os de plus grande envergure, tels les crânes, les grandes vertèbres et les côtes, semblent avoir été apportés ailleurs.

Lors de la chasse, la baleine était harponnée et tuée, puis remorquée par plusieurs chaloupes, généralement par la queue, jusqu'à la station baleinière. Le dépeçage pouvait alors se faire sur la rive ou sur le côté du navire. Les os découverts à Petit Mécatina laissent croire que le dépeçage avait lieu près des navires, sans trop de souci pour l'effet du cumul des os sur les lieux d'ancrage. Cependant, une fois le dépeçage terminé, la carcasse était remorquée ailleurs. Cela permettait de protéger l'ancrage d'un cumul d'os de grande taille, mais éloignait aussi le corps qui pouvait émettre une odeur nauséabonde et attirer des prédateurs ou des charognards. Peu de traces de fanons sont trouvées dans les fouilles subaquatiques, ces derniers se confondant avec les déchets de bois débité retrouvés dans les sondages. Par contre, des fanons sont découverts à plusieurs endroits sur le site terrestre. Ils ont probablement servi à l'aménagement des lieux, ayant été fixés avec des clous sur les toitures, ou étendus sur le sol, pour créer une isolation contre l'humidité.

L'os de baleine est trouvé en 2012 dans un sondage subaquatique situé immédiatement à l'ouest du grand monticule de pierres de lest SP-4. La couche archéologique associée a plus de 50 cm d'épaisseur et comporte un grand nombre de déchets de bois témoignant du travail de charpentiers. Des pierres de lest du monticule voisin sont aussi associées à cette couche. Des restes alimentaires variés y sont mis au jour comprenant des centaines d'os d'oiseaux et de mammifères, dont du boeuf, ainsi que des os de poissons, des coquilles de noix et des noyaux de fruits. Plus d'une trentaine de tessons associés à une marmite à fond arrondi, des petits objets en majolique espagnole, un fragment de chaussure, un anneau de vannerie, un fragment de plomb replié et des restes de cordage y sont découverts. Le site livre des milliers d'os de poissons qui témoignent de la pêche sur le site. Des clous forgés, une pyrite de fer ainsi qu'un fragment de brai sont également trouvés à cet endroit.

RÉFÉRENCES

BARKHAM, Selma, Michael M. BARKHAM, Moira W. BROWN, Brenna A. MCLEOD, M.J. MOORE, Willis STEVENS et Bradley N. WHITE. « Bowhead Whales, and Not Right Whales, Were the Primary Target of 16th- to 17th-Century Basque Whalers in the Western North Atlantic ». Artic. Vol. 61, no 1 (2008), p. 61-75.
BROWN, Moira W., Stephen L. CUMBAA, Timothy R. FRASIER, Robert GRENIER, Brenna A. MCLEOD, Jeya NADARAJAH, Toolika RASTOGI et Bradley N. WHITE. « Genetic Analysis of 16th-century Whale Bones Prompts a Revision of the Impact of Basque Whaling on Right and Bowhead Whales in the Western North Atlanti ». Canadian Journal of Zoology. Vol. 82, no 10 (2004), p. 1647-1654.
FITZHUGH, William W. The Gateways Project 2012. Land and Underwater Excavations at Hare Harbor, Petit Mecatina and Little Canso Island. Rapport de recherche archéologique [document inédit], Smithsonian Institution/Université de Montréal/Artic Studies Center, 2013. 50 p.
FITZHUGH, William W., Anja HERZOG, Brenna MCLEOD et Sophia PERDIKARIS. « Ship to Shore: Inuit, Early Europeans, and Maritime Landscapes in the Northern Gulf of St. Lawrence ». FORD, Ben, dir. The Archaeology of Maritime Landscapes (When the Land Meets the Sea). New York, Springer, 2011, p. 99-128.