Laboratoire d'archéologie du Québec
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Christ en croix. FaceImage
Photo : Émilie Deschênes 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Christ en croix. DosImage
Photo : Émilie Deschênes 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

CeEu-11 > Opération 7 > Sous-opération Q > Lot 11 > Numéro de catalogue 456

Contexte(s) archéologique(s)

Cellier
Remblai

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

Le Christ en croix a été sélectionné pour la collection archéologique de référence du Québec parce qu'il s'agit d'un objet de dévotion personnelle utilisé à la mission Notre-Dame-de-Lorette. Il pourrait avoir été remis à un néophyte autochtone par les missionnaires jésuites.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

Le Christ en croix est un objet de dévotion qui est utilisé sur le site de la mission Notre-Dame-de-Lorette à la fin du XVIIe siècle. Il ne subsiste que l'applique en alliage cuivreux moulé du corps de Jésus vêtu d'un périzonium, dont les bras sont étendus et les pieds, superposés. Il mesure 3,7 cm de hauteur maximale et 3 cm de largeur. De la tête aux pieds, le corps mesure 3,3 cm. Sur la face arrière, un tenon de fixation est protubérant au niveau des omoplates de l'applique de la figurine.

L'applique du Christ en croix sert à être fixée sur une croix en bois, en alliage cuivreux ou dans un autre matériau, et peut servir de crucifix pouvant être suspendu à un chapelet. La croix en tant que symbole du christianisme a rarement été montrée ouvertement avant le IVe siècle, en raison du danger de persécution pour les premiers chrétiens. Ce n'est qu'après la conversion au christianisme de l'empereur romain Constantin que la croix a pu être adoptée comme symbole officiel par les chrétiens, et ce n'est qu'au cours du VIe siècle que les premiers crucifix représentant le Christ sur la croix apparaissent. Vers le XVe siècle, l'image du Christ sans vêtement et en douleur intense s'est mise en place. Le chapelet, objet auquel le crucifix a pu appartenir, est un objet de dévotion personnelle utilisé lors des cycles des prières répétitives comportant des « Je vous salue Marie » et des « Notre Père ». Une fois les cycles achevés, les prières sont complétées par des Notre Père représentés sur le chapelet par un crucifix, une croix ou une médaille suspendus en attache et accompagnés de perles ou d'amulettes. L'utilisation du chapelet pour compter des prières était une pratique adoptée par des chrétiens en Europe depuis au moins le début du XVe siècle, et c'est en 1495 qu'une bulle du Pape Alexandre VI a donné un statut officiel et sacré à l'utilisation du chapelet.

Ce crucifix a été mis au jour lors de fouilles archéologiques du site du presbytère de L'Ancienne-Lorette en 2018. Il a été trouvé dans la quatrième couche de comblement d'une fosse utilisée comme cellier, puis comme fosse à déchets, dans le deuxième presbytère du site, construit vers 1700 sur l'emplacement de la mission huronne Notre-Dame-de-Lorette. Cette couche a été déposée après 1723, car une monnaie anglaise datant de cette année a été trouvée dans le dépôt. Le bâtiment aurait été abandonné à la fin du régime français, vers 1760. La couche contient aussi de nombreux objets de traite et du matériau associé à la fabrication de fourneaux de pipes en pierre que l'on associe à la présence autochtone sur le site. Malgré sa déposition au XVIIIe siècle, cette couche de comblement comporte des sols remaniés provenant de l'occupation de la mission Notre-Dame-de-Lorette au XVIIe siècle, entre 1673 et 1697. Le crucifix trouvé dans ce dépôt pourrait avoir été donné par les missionnaires jésuites à un des chrétiens autochtones habitant la mission Notre-Dame-de-Lorette. Il est maintenant conservé dans les locaux du Laboratoire et de la Réserve d'archéologie du Québec.

Deux crucifix comportant des appliques du Christ en alliage cuivreux très similaires, toujours montés sur des croix en bois, ont aussi été mis au jour dans le cimetière autochtone de la mission jésuite de Sillery, datant également du XVIIe siècle (1638-1698). Il s'agit là certainement aussi de crucifix, et possiblement de chapelets, donnés aux néophytes autochtones par les missionnaires jésuites. D'autres missions autochtones ont également livré des crucifix, telle la mission Marquette au Michigan, occupée par des Hurons-Wendats et des Tionontati entre 1671 et 1705. Plusieurs crucifix trouvés sur le site du Fort Michilimackinac (1715-1781) témoignent aussi de la fabrication de ces objets de piété en deux éléments séparés, croix et corps du Christ, assemblés par un tenon ou rivet.

RÉFÉRENCES

BRANSTNER, Susan M. Archaeological Excavations at the Indian Village Associated with the Marquette Mission Site 20MK82/20MK99, St. Ignace, Michigan. St. Ignace, A Planning Report Submitted to: The St. Ignace Downtown Development Authority, 1987. 231 p.
DEAGAN, Kathleen. Artifacts of the Spanish Colonies of Florida and the Caribbean, 1500-1800. Volume 2: Portable Personal Possessions. Washington, D.C., Smithsonian Institution Press, 1987. 372 p.
GAIA, coopérative de travail en archéologie. Fouilles archéologiques sur le site du Presbytère de l'Ancienne-Lorette (CeEu-11). Rapport de recherche archéologique [document inédit], Ville de l'Ancienne-Lorette, 2019. 652 p.
STONE, Lyle M. Fort Michilimackinac, 1715-1781: An Archaeological Perspective on the Revolutionary Frontier. Anthropological Series, 2. s.l. Michigan State University Museum, East Lansing, 1974. 367 p.