Laboratoire d'archéologie du Québec
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Fragments de pipe à tuyau amovible. Côté gaucheImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Fragments de pipe à tuyau amovible. Côté proximalImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Fragments de pipe à tuyau amovible. Côté droitImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Fragments de pipe à tuyau amovible. Côté distalImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Fragments de pipe à tuyau amovible. Recollage temporaireImage
Photo : Julie Toupin 2020, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

CeEu-11 > Opération 7 > Sous-opération E > Lot 103 > Numéro de catalogue 244
CeEu-11 > Opération 8 > Sous-opération A > Lot 17 > Numéro de catalogue 244

Contexte(s) archéologique(s)

Tranchée de construction

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

Les fragments de pipe à tuyau amovible ont été sélectionnés pour la collection archéologique de référence du Québec parce qu'ils sont associés à une des rares pipes de ce type du site dont la majeure partie de la base et de la quille ont été conservées. De plus, elle provient de contextes anciens qui sont associés au bouleversement des couches d'occupation de la mission Notre-Dame-de-Lorette survenu immédiatement après le départ des Hurons-Wendats pour la Nouvelle Lorette, ce qui rend son association avec la mission relativement certaine. La forme de la base, en ogive arrondie, est typique du XVIIIe siècle, mais sa présence dans un contexte plus ancien sur ce site permet d'élargir la fourchette de datation de ce type de base de pipe à tuyau amovible.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

Les fragments de pipe à tuyau amovible ou « calumet canadien », au nombre de deux, sont associés à un objet servant sert à la consommation de produits narcotiques comme le tabac. La pipe, en calcaire gris pâle, date du XVIIe siècle. La majeure partie de la base et du col ainsi qu'une partie du fourneau sont conservés. Le fourneau est de forme globulaire, mais la partie supérieure comportant la lèvre est manquante. Le col, de plan circulaire, qui se distingue nettement du fourneau et de la base, est légèrement évasé vers le haut. La base a un plan en ogive arrondie, sa partie inférieure est arrondie et elle se termine par une quille distincte à fond plat. Un trou de fumée de 0,4 cm de diamètre est percé dans l'extrémité plate de la base. La hauteur résiduelle de la pipe est de 2,8 cm. La base est courte et mesure 1,5 cm de longueur, 1,2 cm de largeur et 0,9 cm de hauteur. La quille mesure 0,6 cm de hauteur et 0,3 cm de largeur.

La fabrication de la pipe débute par la taille et le dégrossissage d'un petit bloc de calcaire afin d'obtenir une ébauche. Celle-ci est ensuite façonnée pour créer le fourneau, le col et la base. Le foyer et la cheminée sont forés à partir de l'extrémité plus large de l'ébauche et le trou de fumée est foré horizontalement à partir de la base de la pipe. Les contours et les surfaces de la pipe sont adoucis et polis par abrasion. Les lignes de décor sur la base et la quille sont incisées et les deux petits points sont gravés, possiblement dans le but d'y percer un trou d'attache.

La pipe à tuyau amovible ou « calumet canadien » sert à la consommation de narcotiques, dont surtout le tabac. L'espèce principale consommée par les Autochtones était la « Nicotiana rustica L. ». Chez les Autochtones, fumer du tabac est d'abord issu d'une pratique symbolique et spirituelle liée au chamanisme, mais l'habitude de fumer s'est généralisée auprès des groupes autochtones au XIVe siècle, avant le contact avec les Européens. Fumer le calumet fait aussi partie des coutumes traditionnelles entourant l'établissement d'alliances et les négociations lors de la traite des fourrures.

Le plus gros fragment de cette pipe provient d'un lot associé à la construction d'un des murs du deuxième presbytère érigé vers 1700, immédiatement après le départ des Hurons-Wendats. Un petit fragment de quille de cette même pipe provient des déblais de construction du même mur.

Plusieurs caractéristiques permettent de supposer que la pipe n'était pas achevée au moment de son rejet. Il y a notamment le manque de symétrie du décor, l'absence complète d'un décor sur le fourneau, ou du moins sur le fragment conservé du fourneau, et l'absence d'un trou d'attache sur la quille. Il est possible que cette pipe ait subi un bris accidentel qui a mené à son rejet.

Quoiqu'il en soit, des pipes à base en forme d'ogive arrondie sont connues seulement de sites datant du XVIIIe, voire du XIXe siècle, et la présence de cette pipe dans les contextes anciens de la mission à L'Ancienne-Lorette permet de reculer la datation jusque-là admise pour ce type de base au dernier quart du XVIIe siècle. Cette pipe pourrait être l'oeuvre d'un artisan huron-wendat ou iroquois vivant à la mission à cette époque.

Les fragments de la pipe ont été mis au jour entre le 30 mai et le 9 juillet 2018, lors de la fouille d'une partie de l'aire située immédiatement au nord de l'actuel presbytère de L'Ancienne-Lorette. Les fouilles étaient nécessaires au préalable de la construction d'un nouveau centre communautaire adjoint au presbytère à la fin de 2018. La pipe a fait l'objet d'une analyse spécialisée effectuée à la suite de l'inventaire de la collection archéologique provenant des fouilles. Elle a, par la suite, été intégrée dans la collection du Musée huron-wendat de Wendake.

RÉFÉRENCES

CHAPDELAINE, Claude. « Des « cornets d'argile » iroquoiens aux « pipes de plâtre » européennes ». DELÂGE, Denys, dir., Réal OUELLET, dir. et Laurier TURGEON, dir. Transferts culturels et métissages. Amérique / Europe XVIe - XXe siècle. Les Presses de l'Université Laval, Sainte-Foy, 1996, p. 189-208.
DAVIAU, Marie-Hélène. La pipe en pierre dans la société canadienne des XVIIe, XVIIIe, et XIXe siècles. Cahiers d'archéologie du CELAT, 26. Québec, CELAT, 2009. 307 p.
DAVIAU, Marie-Hélène. « Pipes en pierre ». GAIA, coopérative de travail en archéologie. Fouilles archéologiques sur le site du Presbytère de l'Ancienne-Lorette (CeEu-11). Rapport de recherche archéologique [document inédit], Ville de l'Ancienne-Lorette, 2019, p. 497-520.
GAIA, coopérative de travail en archéologie. Fouilles archéologiques sur le site du Presbytère de l'Ancienne-Lorette (CeEu-11). Rapport de recherche archéologique [document inédit], Ville de l'Ancienne-Lorette, 2019. 652 p.
TREMBLAY, Roland. « Se conter des pipes : la pipe dite micmac, des origines amérindiennes aux mythes modernes ». FERLAND, Catherine, dir. Tabac & fumées. Regards multidisciplinaires et indisciplinés sur le tabagisme, XVe - XXe siècles. Québec, Presses de l'Université Laval, 2007, p. 21-50.