Laboratoire d'archéologie du Québec
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Perle. Face AImage
Photo : Patricia Lachapelle 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Perle. Face BImage
Photo : Patricia Lachapelle 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Perle. Vue du trou d'enfilageImage
Photo : Patricia Lachapelle 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Perle. Vue en angleImage
Photo : Patricia Lachapelle 2019, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

CaFe-7 > Opération 1 > Sous-opération Y > Lot 3 > Numéro de catalogue 11

Contexte(s) archéologique(s)

Maison longue
Village autochtone

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

La perle a été sélectionnée pour la collection archéologique de référence du Québec, car il s'agit d'un objet dont la forme, le matériau et les fonctions sont représentatifs de la culture W8banaki (abénaquise). En effet, le perlage est un savoir-faire traditionnel encore pratiqué de nos jours. La perle a également été choisie parce qu'elle a été retrouvée à l'intérieur d'une maison longue traditionnelle sur le site du fort Abénakis.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

La perle est un objet de parure fabriqué en Amérique du Nord pouvant également servir de monnaie d'échange. Entière, elle est taillée en forme de queue de poisson dans une argilite rouge, aussi appelée catlinite. Il s'agit d'une pierre extraite depuis le Sylvicole moyen (2 400 à 1 000 ans avant aujourd'hui) se formant dans des brèches de quartzite. La seule source connue de la catlinite se situe dans une carrière près de la ville de Pipestone au Minnesota, aux États-Unis. L'artiste peintre Georges Catlin (1796-1872) a donné son nom à la pierre en 1836, lorsqu'il s'est rendu à la carrière et a observé les techniques et les traditions des Sioux et des autres nations qui l'exploitaient. Puisqu'aucune trace de transformation de cette matière première ne se trouve sur le site de la découverte de la perle et que la source est très éloignée, cette perle serait fabriquée à l'extérieur du site, puis l'objet fini serait ensuite échangé et transporté sur le site.

Les perles en catlinite sont des objets de parure servant à la confection de bijoux, ainsi qu'à l'ornementation de vêtements et d'accessoires variés. Elles peuvent également servir de monnaie d'échange entre Autochtones de même qu'avec les Européens. Fabriquées par les Autochtones depuis la préhistoire, les perles de ce type sont ensuite fabriquées autant par les Autochtones que par les Européens durant la période historique.

La perle est mise au jour en 2012 sur le site du fort Abénakis, à Odanak. Elle a été retrouvée à l'intérieur d'une maison longue traditionnelle. Une grande majorité des perles en catlinite découvertes sur le site sont taillées en forme de queue de poisson. Ce choix stylistique pourrait être expliqué par l'importance qu'occupe l'esturgeon dans la cosmologie des W8banakiak (Abénaquis). Ce poisson est également l'emblème de la communauté de la région d'Odanak.

Afin de situer l'occupation du site du fort Abénakis, certaines datations ont été réalisées au moyen d'analyses au carbone 14. Elles ont été effectuées sur des fragments de charbon et des grains de maïs carbonisés retrouvés dans certaines fosses du site. Les analyses ont révélé différentes datations, dont la plus ancienne se situe entre 1522 et 1620 (1571 ± 49). Ces résultats suggèrent que le fort Abénakis a été occupé en continu par les W8banakiak (Abénaquis), possiblement à compter des années 1522 ou un peu plus tard. L'occupation s'est ensuite poursuivie jusqu'à l'arrivée des Français dans la région, qui y établissent une mission en 1704. Bien que cette dernière ait été incendiée en 1759, l'occupation du site par les W8banakiak (Abénaquis) s'est tout de même poursuivie et elle perdure encore aujourd'hui.

Des analyses au microscope électronique à balayage (MEB) effectuées sur cinq perles en forme de queue de poisson ainsi que sur deux pipes en pierre rougeâtre retrouvées sur le site confirment qu'elles sont faites de catlinite. Ces deux types d'objets sont les seuls artéfacts en catlinite présents sur le site du fort Abénakis. En outre, les analyses ont permis de distinguer deux matrices différentes pour ces deux types d'objets, suggérant que la matière première n'a pas été prélevée au même endroit dans la carrière. Ceci peut être attribuable à leurs fonctions. Suivant cette hypothèse, les pipes, qui peuvent revêtir un caractère sacré, seraient fabriquées à partir de pierres prélevées dans certaines zones précises de la carrière exploitées pour fabriquer des artéfacts à des fins rituelles. De même, d'autres zones serviraient à fabriquer des artéfacts plus usuels, comme les perles. Les contextes de découverte des pipes et des perles, retrouvées dans des couches stratigraphiques et des contextes différents, appuient également cette idée.

RÉFÉRENCES

CATLIN, George. Letters and Notes on the Manners, Customs and Conditions of North American Indians. Vol. 2. New York, Wiley and Putnam, 1844. 266 p.
DALLAIRE-FORTIER, Coralie. Une étude technologique des ornements abénakis de la période de contact et de la période historique amérindienne retrouvés sur le site archéologique d’Odanak. Université de Montréal, 2016. 134 p.
PLOURDE, Michel et Geneviève TREYVAUD. Les Abénakis d’Odanak, un voyage archéologique. Odanak, Musée des Abénakis, 2017. 127 p.
SCOTT, Douglas D. et Thomas D. THIESSEN. « Catlinite Extraction at Pipestone National Monument, Minnesota : Social and Technological Implications ». LYNOTT, Mark, dir. et Peter TOPPING, dir. The Cultural Landscape of Prehistoric Mines. Oxford, Oxbow Books, 2005, p. 140-154.
SIGSTAD, John S. « A Field Test for Catlinite ». American Antiquity. Vol. 35, no 3 (1970), p. 377-382.