Laboratoire d'archéologie du Québec
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PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

BiFi-23 > Opération 1 > Sous-opération A > Lot 6 > Numéro de catalogue 117

Contexte(s) archéologique(s)

Domestique
Jardin
Remblai

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

La bague dite « jésuite » fait partie de la collection archéologique de référence du Québec parce qu'elle est représentative du type stylistique « V-coeur », un décor peu répandu parmi les collections archéologiques québécoises.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

La bague dite « jésuite » est confectionnée dans un alliage de cuivre impur ou de laiton à faible titre de zinc. Les fondeurs des XVIIe et XVIIIe siècles ne distinguent pas nécessairement ces deux alliages, qui partagent plusieurs propriétés, dont une couleur rouge orangé, une grande malléabilité et une forte résistance à la corrosion. Elle est associée au modèle de bague moulée à décor gravé importé de France. Ce modèle de bague aurait été fabriqué dans le Poitou et embarqué à La Rochelle, un port commercial particulièrement actif dans l'approvisionnement du Canada entre 1630 et 1720, environ.

Le moulage consiste à mettre en forme le métal en fusion en le coulant dans un moule. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les bijoutiers utilisent de nombreuses techniques de moulage pour confectionner des parures en métaux précieux et semi-précieux, notamment la fonte à la cire perdue, la fonte dans des moules réutilisables et la fonte à l'os de seiche.

La technique de décoration utilisée est la gravure. Celle-ci consiste à entamer la surface du métal à l'aide d'un outil tranchant, comme un burin ou une pointe-sèche.

Le décor de cet artéfact, connu sous le nom de « V-coeur », possède une connotation sentimentale. Il s'agit en fait d'un rébus signifiant « mon coeur est à vous ». Dans la société française des XVIIIe et XIXe siècles, les hommes portent des bagues ornées de ce rébus lors de leurs fiançailles. Elles sont également offertes comme cadeaux galants pendant les fréquentations ou échangées en guise de promesse de mariage au moment des accordailles. À l'époque des premiers contacts avec les Européens, plusieurs nations autochtones du nord-est américain considèrent le coeur comme le siège de la vie et du courage. Les parures décorées de ce motif sont très appréciées. Elles permettent vraisemblablement d'accroître la force d'un individu ou d'évoquer sa bravoure.

En Nouvelle-France, la bague dite « jésuite » est un objet de parure portée à la fois par les Français et les Autochtones. Ce type de bague joue également un rôle important dans les relations franco-autochtones.

Cette bague, dont la plaque est altérée et l'anneau est fragmenté et déformé, est mise au jour en 2000 dans le stationnement de l'Hôtel Tourist, à La Prairie. Elle provient d'un remblai déposé lors de l'aménagement du jardin domestique de la maison Doré-Falcon et exposé tout au long de l'utilisation du jardin (1896-1957). La bague dite « jésuite » fait son apparition sur les sites archéologiques nord-américains dès le début du XVIIe siècle, peut-être même avant, et perdure jusque vers 1720.

En 2018, elle fait partie de l'exposition permanente du Musée d'archéologie de Roussillon.

RÉFÉRENCES

MERCIER, Caroline. Bijoux de pacotille ou objets de piété? : les bagues dites « jésuites » revisitées à partir des collections archéologiques du Québec. Cahiers d'archéologie du CÉLAT, 34. Québec, Célat, 2012. 234 p.
MERCIER, Caroline. « Des gages d'amour pour la traite des fourrures : transferts de sens et réappropriations des bagues « jésuites » à motif L-Coeur et des bagues à motif foi en Amérique du Nord-est aux XVIIe et XVIIIe siècles ». Revue de la culture matérielle. No 63 (2006), p. 28-41.