Laboratoire d'archéologie du Québec
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Bague dite « jésuite ». FaceImage
Photo : Julie Toupin 2017, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

Collections archéologiques de la Ville de Québec
Bague dite « jésuite ». Vue généraleImage
Photo : Julie Toupin 2017, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

Collections archéologiques de la Ville de Québec
Bague dite « jésuite ». DétailImage
Photo : Julie Toupin 2017, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

Collections archéologiques de la Ville de Québec

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

CeEt-30 > Opération 27 > Sous-opération E > Lot 51 > Numéro de catalogue 89

Contexte(s) archéologique(s)

Magasins du Roi

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

La bague dite « jésuite » fait partie de la collection archéologique de référence du Québec parce qu'elle est représentative du type stylistique « monogramme christique ». Or, les trois clous placés sous les lettres IHS en font un exemplaire unique. Elle a aussi été choisie en raison de son contexte archéologique de découverte, soit dans un entrepôt géré par l'administration coloniale.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

La bague dite « jésuite » est confectionnée dans un alliage de cuivre impur ou de laiton à faible titre de zinc. Les fondeurs des XVIIe et XVIIIe siècles ne distinguent pas nécessairement ces deux alliages, qui partagent plusieurs propriétés. Cette bague est associée au modèle de bague estampée-assemblée. Importé de France, ce modèle aurait été embarqué à Rochefort, une base navale active dès sa construction en 1666. Le port militaire est approvisionné par les centres de production de l'Angoumois, de l'Aunis, de la Dordogne, de la Saintonge et du Limousin. C'est par là que transite la plus grande partie des objets offerts aux Autochtones en guise de présents diplomatiques. Les navires en partance de Rochefort assurent la surveillance et la défense de la Nouvelle-France, en plus de ravitailler les membres de l'administration coloniale, les troupes royales et les divers chantiers royaux.

La mise en forme de la bague combine plusieurs techniques pour fabriquer la plaque et l'anneau, puis pour les assembler. La fabrication de la plaque débute par la mise en forme au marteau d'une petite masse de métal, appelée flan. Une fois amené à la dimension souhaitée, le flan est placé dans une matrice, nommée étampe. Il s'agit d'un moule en métal qui comporte en creux la forme et le décor de la pièce à produire. Le métal est ensuite frappé pour prendre l'empreinte de la matrice, soit à l'aide d'un marteau, soit à l'aide d'une machine (balancier ou mouton). Cette technique donne simultanément à la plaque une forme ovale et un décor estampé en relief.

Le décor de cet artéfact, le monogramme christique formé des lettres IHS surmontées d'une croix, est le décor le plus répandu sur les bagues à plaque découvertes en Amérique du Nord. Ce serait d'ailleurs l'une des raisons ayant incité les archéologues à accoler le qualificatif « jésuite » à cet objet. Dans les faits, le motif décoratif possède une connotation religieuse ou magico-religieuse plus complexe. Utilisé comme abréviation pour le nom grec de Jésus (IHSOUS ou IHSOYS) depuis l'Antiquité (IVe-Ve siècles), il est popularisé en Europe par saint Bernardin de Sienne (1380-1444) et par saint Ignace de Loyola (1491-1556). Ce dernier en fait le blason de la Compagnie de Jésus, qu'il fonde en 1540. Du XVe au XVIIIe siècle, la piété populaire fait également du monogramme christique un puissant symbole de protection, qui est apposé autant sur les objets de dévotion que sur les objets du quotidien.
En Nouvelle-France, la bague dite « jésuite » est un objet de parure porté à la fois par les Français et les Autochtones. Elle joue également un rôle important dans les relations franco-autochtones.

Cette bague, fragmentée et déformée, est mise au jour en 1989 sur le site de l'îlot des Palais, à Québec. Elle provient d'une couche de sol témoignant de l'occupation et de l'incendie des magasins du roi du premier palais de l'intendant (1686-1713). Les denrées et les marchandises qui y étaient entreposées servaient à approvisionner les armées royales et l'administration coloniale. Ces magasins contenaient aussi des articles destinés au commerce et au maintien des relations diplomatiques avec les Autochtones. La bague dite « jésuite » fait son apparition sur les sites archéologiques nord-américains après 1660 et perdure jusque vers 1730.

RÉFÉRENCES

CÔTÉ, Hélène. Le site du premier palais de l'intendant à Québec : rapport préliminaire de la huitième campagne de fouilles (1989). Rapports et Mémoires de recherche du CÉLAT, 22. Sainte-Foy, CÉLAT, Université Laval, 1992. 162 p.
MERCIER, Caroline. Bijoux de pacotille ou objets de piété? : les bagues dites « jésuites » revisitées à partir des collections archéologiques du Québec. Cahiers d'archéologie du CÉLAT, 34. Québec, Célat, 2012. 234 p.
MOUSSETTE, Marcel. Le site du Palais de l'Intendant à Québec : Genèse et structuration d'un lieu urbain. Nouveaux cahiers du CÉLAT, 10. Québec, Septentrion, 1994. 229 p.
QUESNEL, Annie. Le site du Premier palais de l'intendant à Québec : rapport préliminaire de la septième campagne de fouilles (1988). Rapports et Mémoires de recherche du CÉLAT, 20. Sainte-Foy, CÉLAT, Université Laval, 1991. 219 p.