Laboratoire d'archéologie du Québec
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Mousquet modifié en fusil à silex. Côté AImage
Photo : Jacques Beardsell 2018, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Mousquet modifié en fusil à silex. Côté BImage
Photo : Jacques Beardsell 2018, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Mousquet modifié en fusil à silex. Détail du mécanismeImage
Photo : Jacques Beardsell 2018, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

LOCALISATION

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

DiDt-8 > Opération 14 > Sous-opération N > Lot 2 > Numéro de catalogue 1

Contexte(s) archéologique(s)

Épave

Région administrative

Côte-Nord

MRC

Manicouagan

Municipalité

Baie-Trinité

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

Le mousquet modifié en fusil à silex fait partie de la collection archéologique de référence du Québec parce qu'il se trouvait à bord du navire Elizabeth and Mary lorsque celui-ci a fait naufrage en 1690. Il a également été sélectionné car il s'agit d'un mousquet à crosse en queue de poisson. Ce modèle de crosse de mousquet date des années 1620 à 1660 environ, mais la longueur de son canon original permet de le dater vers 1630.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

Le mousquet modifié en fusil à silex, fabriqué avant 1690, est une arme à feu. L'objet comprend le fût en bois avec la crosse d'épaule, et une baguette en bois en partie insérée dans le fût. Le mécanisme à platine à silex mise à feu en fer est incomplet et entouré d'une concrétion. Le canon est manquant. Le fût en est un de mousquet à mèche, qui a été converti par la suite en fusil à silex. Ce mousquet ancien se reconnait à sa crosse terminée en queue de poisson et à son échancrure au sommet de la crosse pour le passage du pouce du tireur. Le bout inférieur de la crosse a été cependant scié et limé pour faire disparaitre une des extensions de la queue de poisson.

Le fût a été adapté à une platine à silex, grâce à l'ajout d'une plaquette de bois sur la moitié antérieure du découpage pour la platine, qui en épouse le pourtour interne. Une languette de bois de forme rectangulaire a aussi été ajoutée dans la moitié antérieure, près de sa base. Ce type de platine avec chien à verrou a été mis au point aux Pays-Bas et son usage s'est poursuivi jusque vers 1675. Le fût de mousquet était donc pourvu d'une platine à silex d'origine hollandaise lors du naufrage. Cette platine à silex hollandaise n'est toutefois pas la platine originale. La forme de la crosse du fût et l'ajout de piécettes de bois à l'emplacement de cette platine confirment que le mousquet a d'abord été muni d'une platine à mèche.

La portion de chien conservée est encore garnie d'une pierre à fusil. Il s'agit d'une pierre en silex couverte de rouille de fer; elle est taillée sur éclat et mesure 2,5 cm de longueur sur 2,6 cm de largeur. Son talon est entouré d'une chape, qui permet de la consolider dans les mâchoires du chien. La chape, de forme rectangulaire et repliée autour de la pierre, semble être en plomb. Le mousquet a conservé sa sous-garde avec pontet en fer sous le fût, mais l'ensemble est couvert de concrétions

Le canal creusé sur le sommet du fût pour accueillir le canon mesure 3,8 cm de diamètre à la culasse et 2,5 cm à la bouche. Il s'agit des dimensions du canon original du mousquet. Le fond du canal a conservé la trace des trois tenons en fer qui liaient le canon au fût au moyen d'autant de goupilles qui traversent le fût.

La partie inférieure du fût, sous le canon, présente un décrochement qui a été creusé à l'intérieur vers la partie postérieure de l'arme. Cette cavité reçoit la baguette en bois, dont le diamètre grandit de 1,0 à 1,2 cm vers son extrémité antérieure. Le bout plat de cette extrémité est marqué en creux de traits disposés en étoile à cinq branches; il s'agit probablement d'une marque laissée par le propriétaire de l'arme. La baguette sert à compresser la poudre, la balle et la bourre qui sont insérées dans le canon avant chaque tir.

L'arme est conservée sur 1,60 m de longueur (63 pouces). Il s'agit de la longueur d'un mousquet long. Le mousquet long tirait une balle de 20 mm de diamètre environ; la collection renferme une cartouche renfermant une balle de ce diamètre. Le mousquet long est si lourd que son emploi exige l'usage d'une fourquine : il s'agit d'un pieu portatif en bois, planté dans le sol et surmonté d'un étrier dans lequel le mousquet est déposé. Le mousquet long sera remplacé à partir des années 1630 par le mousquet court, mis au point en Suède et d'un calibre inférieur. Le canon original de ce mousquet semble avoir été remplacé par un nouveau canon de calibre inférieur, afin d'alléger l'arme et ne plus devoir recourir à une fourquine pour l'utiliser. Ce nouveau canon mesure environ 39 pouces et il est conçu pour l'usage d'une platine à silex.

Cet artéfact a été mis au jour en 1996 lors de fouilles subaquatiques réalisées dans l'épave du Elizabeth and Mary, un navire ayant fait naufrage en 1690 à Baie-Trinité après le siège de Québec par sir William Phips.

RÉFÉRENCES

BERNIER, Marc-André, dir. L'épave du Elizabeth and Mary (1690). Fouilles archéologiques : Rapport d'activités 1997. Rapport de recherche archéologique [document inédit], Parcs Canada, 2008. 64 p.
BRADLEY, Charles, Phil DUNNING et Gérard GUSSET. « Material culture from the Elizabeth and Mary (1690): individuality and social status in a late 17th-Century New England assemblage ». ROY, Christian, dir. Mer et monde : questions d'archéologie maritime. Archéologiques, Collection Hors-série, 1. Québec, Associations des archéologues du Québec, 2003, p. 150-170.
DURDIK, Jan, Miroslav MUDRA et Miroslav SÁDA. Armes à feu anciennes. Paris, Gründ, 1981. 255 p.
ELLIOT, Robert S. Matchlock to Machine Gun: The Firearms Collection of the New Brunswick Museum. Saint John, The New Brunswick Museum and Brunswick Press, 1981. 64 p.
L'ANGLAIS, Paul-Gaston. Analyse de la collection archéologique pour fins d’interprétation, site BjFj-101, Fort de Ville-Marie / Domaine de Callière. [Document inédit], Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal, 2015. 107 p.
NOËL HUME, Ivor. A guide to artifacts of colonial America. Philadelphie, University of Philadelphia Press, 2001. 323 p.
PETERSON, Harold L. « The Military Equipment of the Plymouth and Bay Colonies, 1620-1690 ». The New England Quarterly. Vol. 20, no 2 (1947), p. 197-208.